Wednesday 18 February 2015

01 Volumes investis : La marche triomphale

16,7 milliards d’euros investis en Île-de-France, soit une hausse de 43% : même dans ses rêves les plus doux, nul n’aurait espéré un tel résultat.
À la troisième marche du podium des meilleurs résultats jamais observés en région parisienne : l’année 2014 s’impose comme un cru exceptionnel pour le marché de l’investissement en immobilier d’entreprise.
Le volume placé en Île-de-France atteint 16,7 milliards d’euros, soit une hausse de 43% par rapport à l’année précédente. Même dans ses rêves les plus doux, aucun observateur n’aurait espéré un tel résultat.
Souvenons-nous en effet : il y a un an, le marché terminait 2013 en léger retrait. Non pas que les investisseurs se méfiaient ou se détournaient des actifs tertiaires ou de la place parisienne. Au contraire, beaucoup d’entre eux restaient sur leur faim ! C’est que tous couraient après le même objectif : la sécurité. La compétition était ainsi féroce pour les actifs Core ou Core Plus tandis que le désintérêt était quasi général pour les immeubles davantage porteurs de risques. Le marché s’étiolait par manque d’actifs cessibles.

Évolution des montants investis en Île-de-France - Source : Knight Frank


Alors, comment expliquer le complet retournement de situation qui a eu lieu en 2014 et comment le risque d’assèchement a-t-il été évité ?

Le profil de risque du marché francilien s’est bien sûr un peu diversifié. Mais pas autant qu’on a pu l’espérer lors de l’annonce de l’acquisition des 185 000 m² de Cœur Défense par Lone Star pour près de 1,3 milliard d’euros. Énorme, cette transaction a fait l’effet d’un coup de tonnerre. S’agissait-il du réveil des cessions distressed ? Non, pas vraiment. Au terme de l’année, les acquisitions d’actifs réalisées dans une stratégie opportuniste, cumulées à celles d’actifs en VEFA non sécurisés ou d’actifs à redévelopper, ne représentent que 14% des volumes investis. C’est beaucoup plus que les 3% enregistrés en 2013 mais le poids de Cœur Défense est tellement prépondérant dans cette augmentation qu’il serait abusif d’en faire une tendance de fond du marché de l’investissement.

Les investissements Core restent ultra-majoritaires. La sécurité qu’ils offrent est à l’origine du succès de l’investissement immobilier.
Les acquéreurs restent en effet, dans leur écrasante majorité, obnubilés par les actifs Core, qui voient d’ailleurs leur part croître entre 2013 et 2014. Et c’est le Core Plus qui en a pâti. Toute cette classe d’actifs, à qui il apparaît possible d’ajouter de la valeur par le biais d’un repositionnement locatif, d’un changement de stratégie de gestion, d’une rénovation ou de la mise en place d’une nouvelle structure de capital, avait joué la vedette en 2013. Elle a singulièrement reflué. Un peu comme si l’élargissement de l’acceptation des risques avait été circonscrite à ceux qui en prenaient déjà le plus.

Répartition de l’activité à l’investissement en Île-de-France par profil de risqueSource : Knight Frank


Répartition de l’activité à l’investissement en Île-de-France par montant des transactionsSource : Knight Frank



Le marché reste aux mains de ceux qui jouent la sécurité. Où trouver en ce cas l’origine de la formidable envolée des volumes investis ?

Elle est à chercher dans la taille unitaire des transactions. C’est là que s’est opérée la mue. L’année 2014 restera comme celle des méga-deals : l’acquisition de Cœur Défense a été suivie de plusieurs autres, telles que celle du portefeuille Risanamento par Chelsfield, pour le compte d'Olayan Group, pour plus de 1,2 milliard d’euros ou celle du centre commercial Beaugrenelle par un consortium d’investisseurs privés pour 700 millions d’euros. Autant d’évènements qui ne s’étaient pas vus depuis longtemps et qui restent exceptionnels.
Près de la moitié du marché s’est faite au travers de 15 transactions. C’est dire son extrême concentration et sa volatilité potentielle.
Au total, les transactions portant sur un montant unitaire de plus de 200 millions d’euros ont trusté le marché. Elles représentent 48% des montants investis en région parisienne en 2014, contre seulement 23% en 2013. Près de la moitié du marché s’est donc faite au travers de 15 transactions seulement. C’est dire son extrême concentration et sa volatilité potentielle !

L’assèchement global de l’investissement en immobilier d’entreprise n’a donc été évité en 2014 que par le recours aux méga-deals. L’analyse que nous faisions à la fin 2013, qui anticipait cet assèchement, reste valide. Le phénomène s’est d’ailleurs concrétisé ponctuellement. Un exemple : le cœur du marché battait en 2013 au rythme des transactions de moins de 100 millions d’euros. Elles ont connu un repli en 2014, avec une baisse de 29% en volume placé et une part de marché réduite à 28% des volumes investis (contre 56% l’année précédente).


Il n’est donc pas exclu d’imaginer que l’envolée du marché de l’investissement soit appelée à retomber au cours des prochains mois. Comme un terme posé à une année hypnotique. Comme une virgule, un souffle, un repos. Dans Aïda, après que les chœurs, les cuivres et les percussions aient donné la marche triomphale, Verdi fait appel aux flûtes et aux cordes, pour jouer un air plus léger.

No comments:

Post a Comment