Wednesday 18 February 2015

02 Offre de bureaux : Paris encore dans la dèche, ou presque

L’impression d’une offre généreuse est un mythe répandu. Il demeure pourtant largement infondé : Paris reste une des villes les moins offreuses d’Europe.

Vous êtes à la recherche de bureaux pour votre entreprise. Franchement, ça ne devrait pas être trop difficile. Avec tous les panneaux de commercialisation qui fleurissent en ville, le choix s’annonce large… Après tout, le marché n’est-il pas aux mains de la demande en cette période de morosité économique ?

Sans vouloir briser ce bel optimisme, les choses ne sont pas si simples.

Que recherchez-vous au juste ? Un immeuble bien sûr, mais pas n’importe lequel. Non, votre préférence va, nous l’avons vu, pour le Grade A. Un de ces immeubles souples et efficaces, qui vous permettra de densifier vos bureaux si nécessaire, sans avoir à redéménager rapidement ou à subir les foudres de personnels mécontents parce que trop « serrés ». Un immeuble qui autorise la mise en œuvre efficace de votre organisation du travail, dans laquelle l’approche collaborative prend une place croissante. Et puis également un immeuble rationnel du point de vue des coûts et des charges. Pas une de ces passoires thermiques qui s’avèrent être des gouffres financiers, ni un de ces vieux zinzins qui ne respectent plus aucun des nouveaux standards environnementaux et qui ne vous apporte aucune sécurité légale ou sociale de long terme en la matière.
Vous recherchez aussi une adresse : pas forcément prestigieuse, surtout pas ostentatoire, mais suffisamment élégante et sérieuse pour appuyer l’image de votre entreprise.
Vient aussi parmi les critères la desserte, notamment en transports en commun. Elle doit vous assurer la pleine mobilité de vos salariés et un maximum de souplesse dans l’organisation du travail et des rendez-vous de vos équipes.
Pour finir, vous cherchez aussi un « cadre urbain » qualitatif. Comme vous ne pouvez pas forcément multiplier les salaires de tous vos employés, vous souhaitez leur offrir une adresse dans un quartier attractif. Un environnement motivant et susceptible de vous aider à conserver vos talents ou à en attirer de nouveaux.

Bref, vous avez compris que l’immobilier est tout à la fois un outil de production, un outil de ressources humaines et un outil marketing. Vous correspondez au portrait type du chef d’entreprise moderne.

Très inégalement répartie sur le territoire régional, l’offre de bureaux est en outre qualitativement inadaptée.

Le problème, c’est que des chefs d’entreprise tels que vous, il y en a beaucoup. Et cela réduit considérablement votre choix dans votre recherche de bureaux : vos critères sont en effet partagés par beaucoup.

Il s’avère en outre que l’impression d’une offre généreuse est largement infondée.

Quantitativement d’abord, les surfaces disponibles à la location en région parisienne représentaient 7,3% du parc de bureaux au terme de l’année 2014. L’offre totale est en légère hausse sur un an, passant de 3,9 millions à un peu moins de 4 millions de m², même si le taux de vacance affiche de son côté une quasi-stabilité, en raison de l’augmentation de la taille du parc.

Tout aussi impressionnants que soient ces 4 millions de m² libres d’occupation, ces chiffres ne traduisent absolument pas une situation de suroffre globale en Île-de-France. Certes, la région parisienne ne peut plus se prévaloir du plus faible taux de vacance d’Europe, contrairement à ce qui a longtemps été le cas. D’autres marchés ont connu une baisse de l’offre beaucoup plus marquée. Londres est ainsi parvenu à passer en dessous de Paris, émargeant à 6,2% de vacance à fin 2014. Mais si Paris ne détient plus ce record, elle continue de s’inscrire en troisième place, juste derrière Hambourg. Pas si mal ! D’autant que les autres métropoles européennes affichent des taux de vacance souvent bien plus élevés. Berlin est à près de 8% et Stockholm à 9,1%. Toutes les autres sont au-dessus de la barre des 10% : Bruxelles à 10,2%, Francfort à 10,7%, Madrid à 11,5%, Varsovie à 16,3%, Moscou à 16,4 % et Saint‑Pétersbourg à 17%.

C’est dire l’hétérogénéité du continent européen en la matière et le niveau de sécurité exceptionnel que représente le marché parisien pour les investisseurs.
Une hétérogénéité qui n’est toutefois pas l’apanage de l’Europe : en son sein, la région parisienne réserve elle aussi une grande diversité de profils.

Pour faire simple, les marchés de Paris intra-muros se situent tous en dessous de la moyenne du taux de vacance régional. En dehors du boulevard périphérique par contre, les marchés affichent des taux supérieurs, avec une pointe à près de 14% sur Péri‑Défense (Rueil-Malmaison, Nanterre, Courbevoie et Puteaux hors Défense). L’écart avec Paris 5/6/7ème arrondissements, sur lequel la vacance peine à atteindre les 3,0%, est saisissant. Le QCA plafonne de son côté juste au‑dessus de 5%. C’est faible.
Et ça ne va pas en s’arrangeant : les taux de vacance sur la ville centre sont en effet pour la plupart à la baisse en tendance annuelle.

Les utilisateurs en quête de bureaux sont donc confrontés à un choix quantitativement limité sur les secteurs les plus recherchés. Même à La Défense, marché malade de l’année 2013, la reprise de l’activité transactionnelle tout au long de l’année 2014 a initié un mouvement de décrue de l’offre disponible.

Mais la principale limite qui se pose au choix des utilisateurs  reste qualitative.

Taux de vacance à fin 2014 en Île-de-France et en Europe - Source : Knight Frank


C’était vrai en 2013, ça l’est tout autant au terme de l’année 2014. Le marché locatif est mono-produit en région parisienne : l’offre est essentiellement constituée de surfaces de seconde main. Bien sûr, certaines d’entre elles sont de bonne qualité lorsqu’elles sont proposées dans des immeubles construits ou restructurés il y a une dizaine d’années. Mais il n’empêche qu’elles n’offrent alors que des performances approchant, sans les égaler, les standards établis par les immeubles les plus récents.

C’est ce qui explique l’appétence des utilisateurs pour les surfaces de Grade A (voir notre encadré « Grade A : Cet éclatant objet du désir »). Force est ainsi de constater que l’Île-de‑France est cruellement déficitaire en offre neuve ou restructurée. Celle-ci ne représentait que 18% des disponibilités proposées en fin d’année 2014 en Île-de‑France. C’est encore moins que les 22% enregistrés un an plus tôt. Pour illustrer l’insuffisance, il suffit de comparer ce ratio avec celui observé dans la consommation des utilisateurs : 81% des surfaces placées via les transactions de plus de 5 000 m² en 2014 étaient du Grade A. Le déséquilibre est flagrant et il est récurrent : 70% des grandes surfaces consommées en 2012 correspondaient à du Grade A et l’année 2013 était déjà montée à 80%. En dehors du Grade A, les grands utilisateurs se reportent presque systématiquement sur d’autres types de surfaces de qualité, notamment les immeubles construits ou restructurés depuis une dizaine d’années et remis sur le marché, à l’image de Cœur Défense ou de la tour Initiale.
C’est dire que décidément, le choix proposé aux utilisateurs est loin d’être aussi riche qu’on l’imagine souvent. Ce n’est pas vraiment la dèche, mais on en approche parfois…
En effet, les disponibilités en Grade A sont très inégalement réparties sur la région parisienne. Elles ne représentent que 12% de l’offre sur le QCA et 11% sur le reste de Paris intra-muros quand elles montent à 15% sur la Première Couronne, 26% sur le Croissant Ouest et qu’elles atteignent un pic à près de 43% sur La Défense.
Là, le choix est plus vaste. Mais si la plupart de ces immeubles répondent entièrement aux attentes techniques des utilisateurs, certains d’entre eux vont avoir un handicap au niveau de l’appréciation de leur emplacement. Il y a des immeubles techniquement de Grade A qui ne peuvent être que des choix par défaut et sont difficilement assimilables à des immeubles Prime.


Pas si facile de chercher des bureaux en région parisienne !

Évolution des taux de vacance en Île-de-France - Sources : Knight Frank, ORIE

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